lundi 26 mars 2012

Campagne Présidentielle sur le Web : Nouveau champ de bataille d’une Guerre de Perception

En février 2012, vous ouvriez votre navigateur Internet. Après avoir entré la requête « Incapable de Gouverner » sur Google, les premiers résultats du moteur de recherche renvoyaient vers le site officiel de François Hollande. Le candidat à l’élection présidentielle était alors victime de Google Bombing. N’étant ni la conséquence d’un piratage, ni d’un bug, ce phénomène est le résultat de liens intelligemment répartis sur le web. En effet, pour classer les pages Internet dans ses résultats, Google se base sur les liens hypertextes pointant en direction de celles-ci et leur attribue un pagerank. En complément, les algorithmes analysent la sémantique de ces liens. Cependant, afin d’avoir une efficacité maximale, ce procédé nécessite d’associer la cible à une requête peu concurrentielle. Il nécessite aussi un certain nombre de référencements de liens et donc certaines ressources.
Cet épisode n’est que le plus récent d’une guerre de perception engagée sur le web entre les deux camps majoritaires à l’élection présidentielle. Les premières attaques ne datent d’ailleurs pas de la campagne actuelle. Déjà, Nicolas Sarkozy avait été la victime, lui aussi, de Google Bombing en 2009.

Premier affrontement de la campagne actuelle, les jeunes du collectif « France à venir », proche d’Eric Besson, décident de mettre en ligne un site de dénonciation, sur le ton de la satire, des difficultés du Parti Socialiste à construire un projet politique cohérent. Le Solférishow trouvera naturellement l’adresse thesolferishow.fr. Mais si les créateurs du site ne font pas l’erreur d’oublier d’acquérir ce nom de domaine, ainsi que celui de thesolferishow.com, c’est sans compter l’acquisition par leurs adversaires de cinq noms de domaine très proches (solferishow.com, solferishow.fr, solferishow.net, solferishow.org, solferishow.tel) renvoyant vers une page se moquant de la naïveté des jeunes du collectif.

Un temps plus tard, suite à son élection comme candidat socialiste à l’élection présidentielle, François Hollande n’a pas l’occasion d’utiliser le nom de domaine hollande2012.fr, alors détenu par un particulier depuis 2007. Plus le résultat d’une négligence, l’adresse renvoyait, cependant, pendant plusieurs jours, vers le site de l’UMP. Le site nicolassarkozy2012.fr renvoie quant à lui vers un site de tatouages.

Néanmoins, si ces épisodes sont plutôt à classer dans les escarmouches, l’affrontement Gauche-Droite est aussi monté d’un cran sur l’échelle d’agressivité. Benjamin Lancar, Président des Jeunes Populaires liés à l’UMP, avait lancé fin aout la « i-riposte ». Mais, oubliant d’acquérir le nom de domaine i-riposte.fr, une version parodique est tout de suite mise en ligne. La guerre du LOL commence. Au couleur de l’UMP, le site arbore alors le sigle LOL et propose des vidéos et des photomontages des membres du parti de l’UMP, sous l’angle de la moquerie. En parallèle, un compte twitter est créé comme relai.

La contre-attaque des Jeunes Populaires viendra à l’annonce du slogan de campagne de François Hollande en Une du quotidien Libération. En achetant le nom de domaine lechangementcestmaintenant.fr avant le PS, ils mettent en ligne une parodie de la Une de Libération, rebaptisée l’Hibernation. S’affiche en pleine page, « le reniement, c’est maintenant » et se succèdent de multiples détournements et fausses déclarations du candidat. Enfin, en bas de page, un lien identifié comme conduisant vers le texte intégral du projet de François Hollande, renvoie finalement vers le mot « Rien ».

S’inspirant du modèle de campagne de Barack Obama, qui s’était beaucoup appuyé sur le web, les deux partis ont beaucoup investi dans le domaine du numérique. S’organisant autour de blogueurs influents, distribuant des formations au Web 2.0 et faisant appel à des agences de communication, les objectifs sont clairs : faire du web une plateforme de mobilisation afin de recruter le plus de volontaires possibles. Les réseaux sociaux sont devenus des vecteurs à part entière afin de relayer les messages de chacun des deux camps.
Tantôt actes de collectifs de Jeunes liés à l’un des partis, tantôt actes des partis eux-mêmes, les évènements relatés ci-dessus dénotent alors quelque peu par rapport à un objectif de mobilisation. Moins qu’un affrontement sur le fond, ils sont l’illustration d’une guerre de perception, prolongement des petites phrases entres candidats lancés dans l’arène politique. Mais l’objectif n’est clairement plus de mobiliser, mais de ridiculiser.

Enfin, dernière étape en date dans l’affrontement, l’amalgame. Le dernier site des Jeune Populaires, www.o-m-g.fr, l’Observatoire des Mensonges de la Gauche, en est emblématique. La bannière du site présente le logo du PS accolé à la faucille et au marteau de l’URSS. Les mots désinformation, mensonges et passéisme y sont inscrits avec une typographie proche de l’alphabet cyrillique.
Pour conclure, on assiste à une montée en puissance des affrontements entre partis sur le Web. Une question demeure : Cela peut-il réellement servir à remporter l’adhésion ?

Article également publié sur Knowckers ici.

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